Blog Accenture Banque

Qu’est-ce que le « Digital Decoupling » ?

Nous vivons un moment étonnant : après des années de développement débridé du digital, il semble que nous soyons en proie à une « saturation digitale », comme le relèvent nos Fjord Trends en ce début 2018. Nous désirons des expériences qui nous apportent le meilleur du physique et du digital. Plus que jamais, les banques doivent concevoir des parcours clients en synergie de leurs différents canaux, et cela comprend désormais les canaux qui se trouvent hors de leurs frontières originelles. Dans un contexte où les GAFAs et autres FinTechs bousculent les écosystèmes établis, les banques traditionnelles ont toutefois des atouts qu’il tient à elles de valoriser : en collaborant avec ces acteurs – plutôt qu’à combattre la désintermédiation.

Mais cela ne sera possible à large échelle qu’avec une architecture du système d’information résolument ouverte et « découplée ». La séparation entre distribution et production ? C’est acquis. Le multicanal – c’est-à-dire adresser chaque canal – idem. L’omnicanal, les banques y travaillent ; mais le « digital decoupling », c’est aller encore plus loin ! En voici les principales dimensions :

  • Découpler les canaux des back-ends via une couche de services réutilisables, qui crée une unicité de langage et de fonctionnement, et qui s’abstrait surtout des limitations des « couches basses ». Ce Middle Tier va jouer un rôle clé dans l’ouverture de l’écosystème… nous allons y revenir.
  • Découpler les canaux des devices : c’est notamment amener les frameworks anydevice du monde digital vers les canaux internes. Car l’agent doit pouvoir passer du poste fixe au portable, à la tablette… pour être en mobilité, au plus près du client.
  • Découpler l’infrastructure : s’appuyer sur des capacités Iaas/PaaS est maintenant chose évidente. Mais la disponibilité et la résilience doivent faire l’objet de réflexions sur le mode de déploiement de chaque couche de l’architecture. En particulier, la capacité à déployer de façon modulaire le Middle Tier est clé, pour éviter un single point of failure et garantir des temps de réponse optimum.
  • Se découpler de sa propre « centricité » : c’est sûrement le point le plus intéressant. Même si la banque a sur étagère des services réutilisables dans son Middle Tier, ces derniers sont « teintés », influencés par son patrimoine historique (legacy) et son organisation. Rendre ces services « attractifs » pour des consommateurs externes n’est donc pas trivial, et va demander un effort accru d’abstraction et de généricité. Les banques qui feront de cette démarche un prérequis systématique à toutes leurs réalisations auront sans conteste un temps d’avance dans l’Open Banking. Sans oublier les enjeux de cybersécurité, qui vont être exacerbés avec l’ouverture de l’écosystème.

Cette transformation doit s’opérer tout poursuivant la rénovation des systèmes cœur, et en intégrant les technologies innovantes. Une vraie intégration, pas une « cohabitation ». Les solutions d’intelligence artificielle, de gestion des contacts, de CRM et d’analytique avancés… doivent être des composants à part entière de l’écosystème ; elles ne doivent pas donner naissance à une nouvelle génération de silos.

 

Une architecture découplée ne suffit pas : il faut qu’elle soit accompagnée de processus de développement et une organisation « liquides »

A ce stade vous devez penser – à juste titre – qu’une telle transformation va prendre un temps considérable. Or la concurrence va vite ; les nouvelles idées doivent arriver en production dans des délais toujours plus courts. L’enjeu est de réussir à combiner les cycles à 2 échelles – ce que nous entendons par 2-speed IT :

  • A l’échelle projet, combiner des réalisations en méthode en V et en méthode Agile. Pour y parvenir, il faudra bien sûr de l’Agile, du DevOps, de la modularité dans l’architecture… mais le nerf de la guerre restera la maîtrise des configurations et des environnements.
  • A l’échelle du SI, allier dans une roadmap cohérente des cycles inférieurs à 2 ans avec les cycles transformationnels de 3 à 5 ans. Pour y parvenir, il faudra que la vision de l’architecture cible soit partagée comme asset stratégique majeur de la banque.

Enfin n’oublions pas l’essentiel : tout cela est construit par des femmes et des hommes ! Or, nous observons qu’encore aujourd’hui, les organisations établies limitent considérablement leur collaboration. Dans le monde du découplage, de l’ouverture, de « l’omni », y a-t-il encore un sens à structurer les services de la banque par canal ou par ligne produit… ? Sans attendre une restructuration profonde, il est crucial que les objectifs projet passent avant les objectifs de chaque département. Le projet doit rassembler toutes les parties prenantes : métier, MOA, MOE, architecture, sans oublier la conformité, le risque, le juridique… en une seule équipe unie, et ayant comme seule obsession la création de la meilleure expérience possible pour les clients.